Santé du corps ou liberté du cœur ?

L’homélie du Père Guy-Emmanuel Cariot, recteur de la basilique d’Argenteuil, lors de la première Veillée ELEISON du 13 octobre 2017.


ÉVANGILE DE JÉSUS-CHRIST SELON SAINT MARC ( 2, 1-12)

1 Quelques jours plus tard, Jésus revint à Capharnaüm, et l’on apprit qu’il était à la maison. 2 Tant de monde s’y rassembla qu’il n’y avait plus de place, pas même devant la porte, et il leur annonçait la Parole. 3 Arrivent des gens qui lui amènent un paralysé, porté par quatre hommes. 4 Comme ils ne peuvent l’approcher à cause de la foule, ils découvrent le toit au-dessus de lui, ils font une ouverture, et descendent le brancard sur lequel était couché le paralysé. 5 Voyant leur foi, Jésus dit au paralysé : « Mon enfant, tes péchés sont pardonnés. » 6 Or, il y avait quelques scribes, assis là, qui raisonnaient en eux-mêmes : 7 « Pourquoi celui-là parle-t-il ainsi ? Il blasphème. Qui donc peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul ? » 8 Percevant aussitôt dans son esprit les raisonnements qu’ils se faisaient, Jésus leur dit : « Pourquoi tenez-vous de tels raisonnements ? 9 Qu’est-ce qui est le plus facile ? Dire à ce paralysé : “Tes péchés sont pardonnés”, ou bien lui dire : “Lève-toi, prends ton brancard et marche” ? 10 Eh bien ! Pour que vous sachiez que le Fils de l’homme a autorité pour pardonner les péchés sur la terre… – Jésus s’adressa au paralysé – 11 je te le dis, lève-toi, prends ton brancard, et rentre dans ta maison. » 12 Il se leva, prit aussitôt son brancard, et sortit devant tout le monde. Tous étaient frappés de stupeur et rendaient gloire à Dieu, en disant : « Nous n’avons jamais rien vu de pareil. »


« Mais, quand le Fils de l’homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » s’exclame Jésus dans l’évangile selon Saint Luc. Dans ce grand combat entre la foi et l’incroyance, qui l’emportera dans le cœur des hommes ? De la foi ou de l’incroyance, qu’est-ce qui triomphera ce soir en présence de la Sainte Tunique, c’est à dire en présence de la Passion du Sauveur ? Ce combat, c’est le drame qui traverse tout le ministère de Jésus mais aussi toute notre vie.

LA FOI
La foi, elle existe bien chez ces hommes qui portent le brancard ; une foi décidée, active, presque impatiente. Ils souffrent de voir souffrir cette personne handicapée, leur ami, et ils savent que Jésus est pour lui la dernière chance, une vraie chance comme Dieu seul peut en envoyer.

Aucune barrière ne les arrêtera : ni la foule, ni l’ascension de la maison, ni même le toit ! Ils vont vaincre par leur foi l’indifférence de la foule, par leur force et leurs efforts la montée de l’escalier, par leur intelligence et leur courage la descente du malade par le toit.

« Il se trouvera toujours de beaux esprits pour trouver insoutenable que Jésus Christ, vrai homme, agisse aussi en vrai Dieu. »

Ils le savent au plus profond de leur cœur et ils l’espèrent : si Jésus voit cet homme, ce paquet de souffrance et de misère, il agira et triomphera de son mal. La foi est là mais l’incroyance est aussi bien campée dans le cœur des scribes. Ils ont pourtant posé la vraie question : « Qui peut remettre les péchés, sinon Dieu seul ? » Mais plutôt que de professer : « Cet homme fait les œuvres de Dieu », ils préfèrent dire : « Cet homme blasphème ! »

Il en est ainsi dans tous les temps. Il se trouvera toujours de beaux esprits pour refuser de reconnaître qui est le Christ, ou pour le ramener aux dimensions de la simple raison, et pour trouver insoutenable que Jésus Christ, vrai homme, agisse aussi en vrai Dieu.

LE PARDON
Le brancard descend par le trou du toit ; l’homme est là, aux pieds de Jésus, plus immobile que jamais. Comment ne pas reconnaître ici nos propres paralysies à aimer, à pardonner, à devenir saints, toutes nos paralysies à renoncer au mal, à nous convertir, à faire pénitence ?

Tout le monde attend la parole de guérison, mais les mots qui sortent de la bouche du Christ semblent ne pas voir la souffrance physique : « Mon enfant, les péchés te sont remis ».

Jésus ne répond pas au niveau de la demande, parce qu’elle n’est pas assez profonde. Jésus va se placer au niveau du bien radical de l’homme, comme il va le faire pour nous ce soir. On lui demande la santé du corps ; il donne la liberté du cœur. On lui réclame un miracle, il donne un signe de sa puissance.

« On réclame à Jésus un miracle, il donne un signe de sa puissance. »

Au risque de décevoir le paralysé, il prononce tout de suite la parole du salut, comme s’il ne pouvait pas s’en empêcher, parce qu’il est le Fils de Dieu qui a toute puissance sur la terre pour pardonner et redresser les hommes. Comme le proclamera Saint Pierre au Grand prêtre : « En nul autre que Jésus, il n’y a de salut, car, sous le ciel, aucun autre nom n’est donné aux hommes, qui puisse nous sauver » (Actes 4).

Jésus a vu leur foi, il compte sur leur foi, et il veut répondre à leur audace par son audace de Fils de Dieu. Et c’est aussi ce que nous sollicitons ce soir : notre audace et celle de Dieu.

LA GUÉRISON
La guérison viendra, mais dans un second temps, comme un signe pour ébranler l’incroyance des scribes : « Je te l’ordonne, prends ton brancard et rentre chez toi ! ». Alors, ce soir, nous osons aussi demander à Dieu un signe pour que se manifeste sa puissance quand il se penche sur nos faiblesses.

Mais entendons aussi Jésus nous demander d’être actifs dans notre propre guérison, dans notre propre libération : « Lève-toi ! » lui dit-il. C’est en obéissant à la parole qu’il va traduire sa foi ; et son corps va se dénouer, se déplier, la guérison accompagnant l’obéissance au Christ.

« Laissons-le nous désigner nos paralysies et nos liens, t ce qui nous empêche de lui répondre. »

À travers cet épisode de l’Évangile, Jésus vient nous dire : « Ce qui te paralyse, c’est le péché ». Alors ce soir, quel que soit le mal qui nous atteint, laissons le Verbe incarné, Jésus, voir notre foi. Laissons-le nous dire une parole de salut, laissons-le nous désigner nos paralysies et nos liens, et ce qui nous empêche de lui répondre.

Laissons-le nous guérir en profondeur. Laissons-le dénouer les liens de nos esclavages, laissons-le chasser l’esprit du mal là où il s’est niché, que nous l’ayons invité par nos imprudences et nos manques de foi – astrologie, voyance, guérisseurs, magnétiseurs, spiritisme, magie…- ou qu’il se soit approché vers nous-mêmes pour attaquer en nous tout ce qui peut être éternellement sauvé, béni pour être en présence du Dieu de toute joie et de toute paix.

Demandons pour nous et pour nos frères le pardon de nos péchés, en implorant le Sauveur qu’il se penche sur les misères de ce monde. Allons avec foi vénérer la Tunique du Sauveur. En vénérant la relique de la Sainte Tunique, en embrassant ce petit reliquaire laissons-nous totalement embrasser par celui qui veut nous sauver car ils nous aime plus que tout et qu’il nous veut tout à lui.

Quand le Saint Sacrement passera parmi nous tout à l’heure, nous serons comme cet homme paralysé ou comme ses porteurs devant le Sauveur à Capharnaüm. Que Jésus puisse voir notre propre foi. Alors comme un feu qui ne peut que grandir si on apporte le bois mort de notre foi, il nous embrasera. Que vienne l’Esprit de feu sur notre assemblée !