LA TUNIQUE
LA RELIQUE
La Sainte Tunique, un témoin unique de la Passion
La Sainte Tunique d’Argenteuil est vénérée comme le vêtement porté par le Christ de la Sainte Cène au pied de la Croix. C’est le témoin charnel de la Passion : la pièce de laine est tachée du sang humain. Ce vêtement est parvenu jusqu’à nous, conservé et transmis pendant près de 2000 ans. La tradition chrétienne y reconnaît le vêtement que portait le Christ et le mentionne dans les Evangiles (Jn 19, 23-24) comme le vêtement tiré au sort par les soldats romains après la cruxifixion.
De nombreuses preuves d’authenticité ont été apportées par les études scientifiques au fil du temps dont l’analyse des pollens, du tissage et du groupe sanguin.
Ce qu'en dit l'histoire
De Jerusalem ...
Sans doute rachetée au soldat par les disciples, la Tunique a du devenir très vite pour l’Église naissante un précieux témoignage de la Passion du Christ. Les premiers siècles de l’histoire de la Tunique nous restent en partie cachés. A cause des invasions perses et musulmanes au VIIème siècle, les reliques alors en Terre Sainte sont collectées à Constantinople et l’empire d’orient, fragilisé, cherche à l’ouest des alliés. L’impératrice Irène, à la fin du VIIIème siècle, dépêche des diplomates auprès du nouvel empereur d’occident, Charlemagne. De nombreuses preuves d’authenticité ont été apportées par les études scientifiques au fil du temps dont l’analyse des pollens, du tissage et du groupe sanguin.
à Argenteuil
Elle joint à son ambassade des présents de prix: parmi eux, la Tunique du Christ. Le très chrétien Charlemagne confie la relique à sa fille Théodrade alors moniale au monastère de l’Humilité de l’Incarnation à Argenteuil. La Tunique y serait arrivée le 12 août 800 à 13h ! Les invasions normandes du IXème siècle chassent les religieuses de leur monastère. Elles cachent la Tunique dans les murs du monastère et ce n’est que deux siècles plus tard que les moines de Saint Denys, entreprenant des travaux au monastère, la retrouvent nichée dans un mur.
Entre cachettes et ostensions
C’est en 1156 qu’a lieu la première ostension, organisée par Hugues d’Amiens, archevêque de Rouen, en présence du roi Louis VII, de nombreux évêques et d’une grande affluence de fidèles. A cette occasion, la charte de 1156, procès verbal de l’ostension, est établie.
Durant la Guerre de Cent Ans, l’abbaye est à nouveau pillée et incendiée en 1411 et l’église paroissiale n’est reconstruire qu’en 1449. La “robe de Dieu” est alors l’objet de nombreux pèlerinages, notamment des rois de France – François 1er, Henri III, Louis XIII- des reines Marie de Médicis et Anne d’Autriche mais aussi du cardinal de Richelieu. De grandes processions se déroulent alors, signe d’une grande piété populaire donnant lieu aussi à de nombreux miracles.
Durant les guerres de religion en 1567, la Tunique est sauvée lors de la prise d’Argenteuil par les huguenots.
A partir de la Révolution
Sous la Révolution, le prieuré bénédictin est supprimé et la relique remise à l’église paroissiale. Le 18 novembre 1793, face à la menace de confiscation des biens de l’Église, le curé d’Argenteuil Ozet (1749-1816) la découpe en morceaux et en confie certains à des paroissiens. Il enterre de grands morceaux dans son jardin avant d’être emprisonné durant une année.
En 1795, libéré, il retrouve la Tunique mais ne parvient pas à en rassembler tous les morceaux.
Un rythme d’ostension tous les 50 ans
Les pélerinages et les ostensions solennelles reprennent au XIXème siècle. En 1866 est construite la nouvelle église. En 1894, une ostension solennelle a lieu après que l’évêque de Versailles a diligenté des études scientifiques sur le textile. Ces mêmes études identifient du sang humain sur la Tunique.
Pour cette ostension, chacun des 20 morceaux existant de la Tunique sont fixés sur un tissu de support de satin en forme de tunique. C’est cette forme qui est connue jusqu’à nos jours.
En 1934 est organisée une nouvelle ostension ainsi que 50 ans plus tard en 1984. Cette année là, la Tunique est volée puis restituée au Père Guyard, curé de la basilique. Il n’a jamais révélé par qui avait été commis le vol.
En 2016, Mgr Stanislas Lalanne, l’évêque de Pontoise et « gardien de la Sainte Tunique » invite les fidèles à une ostension solennelle : à l’occasion du Jubilé des 50 ans du diocèse de Pontoise, des 150 ans de la construction de la basilique et au niveau mondial, de l’année de la Miséricorde décrétée par le Pape François.
Sans couture, tissée d’une seule pièce
Les juifs du premier siècle portaient sous le manteau (simba) deux tuniques: une épaisse de dessus (chetoneh), une légère en-dessous (sadin). La tunique (en grec khiton) était ajustée au corps et avait des manches. On la portait tantôt sur le corps nu, tantôt sur une chemise de laine très ample et très longue.
A l’époque, cet habit faisait office de sous-vêtement, il était de rigueur de porter une seconde tunique par-dessus. En laine naturelle teinte à la garance, elle était de très simple facture.
la Sainte Tunique d’Argenteuil est un vêtement tissé, ce qui signifie qu’il a été fabriqué sur un métier à tisser. Elle est par ailleurs inconsutile c’est-à-dire « sans couture ». Elle a été faite d’une pièce, sans que des morceaux de tissus différents aient été réunis.
La laine n’a été mêlée à aucune substance végétale.
Ce qu'en dit la science
Un textile du 1er siècle
La tunique a été réalisée sur un métier à tisser rudimentaire et assez large, outil répandu dans le Proche-Orient de l’époque. Elle est faite en laine de mouton. La torsion du fil (en Z) est très forte – 1400 tours par mètre de fil, donnant un effet « crêpe ». Le tissage est remarquablement régulier. La laine est colorée par une plante de la famille des rubiacées.
Les micro-particules
Prélevées par aspiration fine sur la tunique, les micro-particules ont révélé aussi des trésors: présence de grains de sables de région désertique, présence d’aragonite (variété de carbonate de calcium) très présent dans les pierres de construction de Jérusalem.
Les pollens renvoient à des plantes de zones semi-désertiques du Proche-Orient. 15 espèces ont été identifiées dont plusieurs communes avec le Linceul de Turin et le suaire d’Oviedo. Des particules de peau et de de cheveux ont aussi été découverts.
Les analyses de sang
Dès 1892, des analyses avaient été réalisées sur une partie du « dos » de la tunique, où les tâches rougeâtres discrètes étaient encore visibles. Le résultat fut sans appel : il s’agissait de sang humain.
En 1934, des photographies en infrarouge appuyèrent ce résultat et permirent de situer assez précisément l’emplacement de ces tâches sur la tunique. En 1986, le groupe sanguin fut trouvé. Il s’agissait du groupe AB, groupe très rare ne concernant qu’un faible pourcentage de la population mondiale (0,5%).
En 2005, des traces ADN sont exploitées et donnent des résultats intéressants: le sang est celui d’un individu de sexe masculin, probablement originaire de Méditerrannée orientale.
Les observations scientifiques menées sur l’objet réunissent des indices très concordants en faveur de son authenticité.
Le C14
En 2004, un échantillon de la tunique fut analysé au C14 au laboratoire de Saclay. Les résultats donnèrent une datation comprise en les années 530 et 650.
Selon les avertissements des chercheurs qui réalisèrent cette étude, il faut noter que la datation issue du tissu ancien de laine ou de lin peut présenter des résultats erronés à cause d’évènements historiques « polluants » comme l’attaque par l’eau et par le feu, l’enfermement dans le mur de l’abbaye pendant deux siècles au contact de moisissures, de l’enterrement de la relique dans le cimetière pendant la révolution française.
Ces mêmes chercheurs prévenaient que cette étude au C14 n’avait d’intérêt que si elle croisait avec d’autres analyses scientifiques.
Un même groupe sanguin AB
Des enquêtes scientifiques effectuées en 1985 et répétées en 1993 révèlent la présence du même groupe sanguin AB sur les trois grandes reliques textiles de la Passion connues : la Tunique d’Argenteuil, le Linceul de Turin et le Suaire d’Oviedo (linge spécifique entourant la tête du défunt dans une sépulture juive antique). La probabilité d’observer ce groupe sanguin sur les trois linges s’établit à une chance sur 8000 !
Le groupe AB est extrêmement rare, ne concernant que 3,2% de la population mondiale et était pratiquement inexistant dans la population de l’Europe médiévale. Il a par contre toujours été très répandu au Proche-Orient. On le trouve notamment en très forte concentration en Judée et Galilée.
L’étude des pollens
Une étude de 2015 menée par des chercheurs de l’UCAM (Université Catholique de Mursie) a établi une comparaison des pollens présents sur les trois reliques: sept sont communs aux reliques de la Tunique d’Argenteuil, du Linceul de Turin et du Suaire d’Oviedo. Deux proviennent uniquement de Palestine : ceux d’un pistachier, Pistacia palaestina et d’un tamarin, Tamarix hampeana.
CE QU'EN DISENT LES EVANGILES
La Tunique, symbole de l'unité
L’Evangile de Saint Jean met en exergue la tunique sans couture qui peut renvoyer à la dignité sacerdotale du Christ ou à l’unité de l’Église. Le partage des vêtements de Jésus est l’un des épisodes de la Passion du Christ dans lequel des soldats romains se partagent les vêtements du Christ et tirent au sort sa tunique inconsutile (sans couture)“Ne la déchirons pas”« Après l’avoir crucifié, ils se partagèrent ses vêtements, en tirant au sort, afin que s’accomplît ce qui avait été annoncé par le prophète : Ils se sont partagé mes vêtements, et ils ont tiré au sort ma tunique. »
— Mt 27, 35
« Les soldats, après avoir crucifié Jésus, prirent ses vêtements, et ils en firent quatre parts, une part pour chaque soldat. Ils prirent aussi sa tunique, qui était sans couture, d’un seul tissu depuis le haut jusqu’en bas. Et ils dirent entre eux : “ne la déchirons pas, mais tirons au sort à qui elle sera”. Cela arriva afin que s’accomplît cette parole de l’Écriture : Ils se sont partagé mes vêtements, et ils ont tiré au sort ma tunique. Voilà ce que firent les soldats. »
— Jn 19, 23-24
«C’était une tunique sans couture» Jn 19, 24 L’unité est un don de Dieu. Jésus nous en revêt en nous donnant sa tunique. Il veut faire l’unité en nous, dans l’Eglise et dans le monde.Nous le savons, Jésus est mort « afin de rassembler dans l’unité les enfants de Dieu dispersés » (Jn 11,52). L’unité dans lequel il veut rassembler les enfants de Dieu, c’est celle qui l’unit au Père, rien moins que cela. Sommes-nous des acteurs de division ou d’unité dans notre vie?