MÉDITATIONS DU VENDREDI #4 : « JE SERAI SAUVÉE »

« Si je parviens seulement à toucher son vêtement, je serai sauvée. » Mt 9, 21 

Pour cette quatrième méditation de vendredi de carême pour nous préparer à l’ostension, j’aimerais vous emmener sur un chemin ardu et difficile et vous parler de guérison. En général, lorsque l’on évoque le thème de la guérison avec des chrétiens, la réaction ne tarde pas à venir : « Attention, il ne faut pas trop faire espérer les gens ! Jésus offre surtout à l’homme une guérison intérieure ! Attention à ne pas faire du spectacle ! » Pourtant l’épisode de la femme atteinte d’un flux de sang dans les trois évangiles synoptiques devrait nous révéler combien cette guérison est possible, belle, et signe d’un salut qui est le tout de l’homme. Rappelons-nous cette scène de l’évangile (Luc 8) :

43 Or, une femme qui avait des pertes de sang depuis douze ans, et qui avait dépensé tous ses biens chez les médecins sans que personne n’ait pu la guérir, 44 s’approcha de lui par-derrière et toucha la frange de son vêtement. À l’instant même, sa perte de sang s’arrêta. 45 Mais Jésus dit : « Qui m’a touché ? » Comme ils s’en défendaient tous, Pierre lui dit : « Maître, les foules te bousculent et t’écrasent. » 46 Mais Jésus reprit : « Quelqu’un m’a touché, car j’ai reconnu qu’une force était sortie de moi. » 47 La femme, se voyant découverte, vint, toute tremblante, se jeter à ses pieds ; elle raconta devant tout le peuple pourquoi elle l’avait touché, et comment elle avait été guérie à l’instant même. 48 Jésus lui dit : « Ma fille, ta foi t’a sauvée. Va en paix. »

On sait que St Luc était médecin et l’allusion aux traitements inefficaces de ses confrères n’est pas sans humour… On sent tout le désespoir de cette femme affaiblie par ces pertes de sang chroniques. Sa foi va la pousser à accomplir un geste osé, audacieux, culotté. Effectivement selon la lettre de la Loi de Moïse (Lv 15, 19-33), elle était impure et devait rester dans son isolement et ne toucher personne. Dans la tristesse de sa maladie, de sa souffrance, de son isolement, de ses finances ruinées, elle se voit décliner de plus en plus. St Marc, dans le texte parallèle, le souligne : « elle avait beaucoup souffert du traitement de nombreux médecins, et elle avait dépensé tous ses biens sans avoir la moindre amélioration ; au contraire, son état avait plutôt empiré » (Mc 5, 26). Ne connaissons-nous pas tous un tel malade ? Peut-être le sommes-nous nous-mêmes !

Ce qui va se passer après est sublime : prenant son courage à deux mains, poussée par une foi pure, elle touche le vêtement de Jésus et aussitôt s’arrête son hémorragie. Immédiatement elle sent en son corps qu’elle était guérie de son mal. Mais le texte continue et nous présente une étrange réaction du Christ : « Qui m’a touché ? » dit-il alors que les foules le pressent. Il disait cela car il « se rendit compte qu’une force était sortie de lui ». Retraçons les mouvements :

  • une femme en état rituel d’impureté veut toucher le vêtement du Christ, pour être sauvée de son mal
  • elle touche le bout du vêtement du Christ
  • Celui-ci sent qu’une force était sortie de lui

Quelle beauté dans ce texte, quelle leçon pour nous et notre foi ! Effectivement notre foi a un effet sur Dieu lui-même ! Comme l’écrivait St Thomas d’Aquin, Dieu est bonum diffusivum sui, c’est à dire le bien diffusif de lui-même. Comme un feu, il ne peut s’empêcher de croître si on lui apporte du combustible. La nature du feu est de se propager, la nature de Dieu est de se répandre en miséricorde et le « combustible » qui obtient cela est la foi des hommes. Dieu est touché par la foi des hommes.

Quelle grâce cela sera pour nous dans quelques jours à notre tour de « toucher » (des yeux !) le vêtement de Jésus ! Nul fétichisme ou superstition ici ! Seulement la foi !

On m’objectera que tous ceux qui viendront avec le cœur rempli de foi et malades ne guériront pas miraculeusement. Le texte nous dit : « Si je parviens à toucher seulement son vêtement, je serai sauvée. ». C’est le salut et non la guérison qui est l’objet de sa foi et il doit en être ainsi pour nous. Chaque ostension de la sainte tunique fut une occasion de guérisons miraculeuses et de conversions. Il en sera de même, soyons-en assurés, pour l’ostension qui s’annonce. Tous, nous portons en nous plusieurs maladies. Nos corps peuvent en souffrir mais nos âmes également et de manière encore plus grave. Tous nous pourrons reprendre ce cri intérieur de désir de cette femme : « Si je touche son vêtement, je serai sauvée ». Certes il s’agit pour nous, en voyant la Tunique, de voir celui qui la porta. En touchant la frange du vêtement la femme se souvient de ce que cette frange était pour les juifs : « Vous aurez donc une frange ; chaque fois que vous la regarderez, vous vous rappellerez tous les commandements du Seigneur et vous les mettrez en pratique ; (…) Ainsi vous vous rappellerez et vous mettrez en pratique tous mes commandements, et vous serez saints pour votre Dieu. » (Nb 15, 39-40). Derrière tout désir de guérison, il doit y avoir ce désir de saisir les promesses de Dieu  et de grandir en sainteté. La santé elle-même pourrait sinon devenir une idole dangereuse. Ainsi, pour guérir (intérieurement et/ou extérieurement), nous avons grand besoin de ce grand désir intérieur d’être saint. C’est cela le plus important.

Saint Ambroise de Milan écrivait dans son commentaire sur St Luc « Si nous considérons la taille de notre foi et si nous comprenons la grandeur du Fils de Dieu, nous voyons que par rapport à lui nous ne touchons que la frange ; le haut de son vêtement, nous ne pouvons pas l’atteindre. Si donc nous voulons nous aussi être guéris, touchons par la foi la frange du Christ. Il n’ignore pas tous ceux qui touchent sa frange, qui la touchent quand il est tourné. Car Dieu n’a pas besoin d’yeux pour voir ; il n’a pas de sens corporels, mais possède en lui la connaissance de toutes choses. Heureux donc qui touche au moins l’extrémité du Verbe : car qui peut le saisir tout entier ? »

Le samedi 2 avril à 20h, il y aura une prière pour la guérison des malades. Venons crier notre désir d’être sauvés, prions les uns pour les autres. Soyons comme les porteurs du paralytique. « Voyant leur foi, il dit : « Homme, tes péchés te sont pardonnés. » Les scribes et les pharisiens se mirent à raisonner : « Qui est-il celui-là ? Il dit des blasphèmes ! Qui donc peut pardonner les péchés, sinon Dieu seul ? » Mais Jésus, saisissant leurs pensées, leur répondit : « Pourquoi ces pensées dans vos cœurs ? Qu’est-ce qui est le plus facile ? Dire : “Tes péchés te sont pardonnés”, ou dire : “Lève-toi et marche” ? Eh bien ! Afin que vous sachiez que le Fils de l’homme a autorité sur la terre pour pardonner les péchés, – Jésus s’adressa à celui qui était paralysé – je te le dis, lève-toi, prends ta civière et retourne dans ta maison. » À l’instant même, celui-ci se releva devant eux, il prit ce qui lui servait de lit et s’en alla dans sa maison en rendant gloire à Dieu. Tous furent saisis de stupeur et ils rendaient gloire à Dieu. » (Luc 5, 20-26a)

Père Guy-Emmanuel Cariot, recteur

MÉDITATION

Pour méditer cette semaine :

  • Tous atteints par la maladie du péché qui nous conduit à la mort, nous avons besoin d’un sauveur. Essayons cette semaine de scruter notre âme et de jauger l’état de notre désir de salut. Si nous trouvons notre désir éteint, approchons-nous du feu de la Miséricorde. Sans désir, nous ne pouvons « toucher » Dieu.
  • Le Pape François a rappelé en ouvrant l’année de la Miséricorde combien il nous fallait accomplir les œuvres de la Miséricorde. Parmi elles, il y a la visite aux malades. Cette semaine je vais visiter un malade par amour pour Jésus.

Prière de la semaine : Par ta Sainte Tunique, sauve-moi, Jésus !

(Pour la veillée de prière de guérison, un accès pour les personnes à mobilité réduite est prévu. Pour toute demande particulière, n’hésitez pas à cliquer ici : contact@saintetunique.com)