MÉDITATIONS DU VENDREDI #6 : « VOICI VOTRE ROI ! »

Pour cette dernière méditation de carême, j’aimerais que nous regardions dans l’évangile selon Saint Jean ce qui a trait, à propos de la Passion de Jésus, à sa royauté. Effectivement cette Passion, particulièrement, nous conduit à contempler en Jésus un roi étrange, et même à y voir un cérémonial de consécration royale.

Si nous nous remettons dans la situation de ces jours saints, nous voyons que le motif de condamnation de Jésus, celui qui sera indiqué sur le « titulus » accroché à la croix (l’écriteau portant le motif de la condamnation), est le fait qu’il ait prétendu être roi. : « 19 Pilate avait rédigé un écriteau qu’il fit placer sur la croix ; il était écrit : « Jésus le Nazaréen, roi des Juifs. » (…) 21 Alors les grands prêtres des Juifs dirent à Pilate : « N’écris pas : “Roi des Juifs” ; mais : “Cet homme a dit : Je suis le roi des Juifs”. » 22 Pilate répondit : « Ce que j’ai écrit, je l’ai écrit. ».

Pilate avait parlé de cela avec Jésus pendant sa comparution : « Es-tu le roi des Juifs ? » (…) 36 Jésus déclara : « Ma royauté n’est pas de ce monde ; si ma royauté était de ce monde, j’aurais des gardes qui se seraient battus pour que je ne sois pas livré aux Juifs. En fait, ma royauté n’est pas d’ici. » 37 Pilate lui dit : « Alors, tu es roi ? » Jésus répondit : « C’est toi-même qui dis que je suis roi. Moi, je suis né, je suis venu dans le monde pour ceci : rendre témoignage à la vérité. Quiconque appartient à la vérité écoute ma voix. » (…) 39 « Voulez-vous donc que je vous relâche le roi des Juifs ? ».

On le sait, la discussion de Pilate avec Jésus avait marqué le gouverneur de Judée. Il « cherchait à le faire relâcher » écrit Saint Jean. La question de la royauté est donc centrale dans cette Passion. La scène des dérisions qui suit nous fait encore franchir une étape : « 2 Les soldats tressèrent avec des épines une couronne qu’ils lui posèrent sur la tête ; puis ils le revêtirent d’un manteau pourpre. 3 Ils s’avançaient vers lui et ils disaient : « Salut à toi, roi des Juifs ! » Et ils le giflaient.» (ch. 19) Alors voici donc la royauté dont il est question ? Une royauté de carnaval ? Cet homme brisé par la flagellation, cet homme dont la chair est lacérée, abandonné de tous, livré par son peuple à un gouverneur fatigué, est-ce bien l’image d’un roi ? Les accusateurs de Jésus n’en démordent pas : « 12 des Juifs se mirent à crier : « Si tu le relâches, tu n’es pas un ami de l’empereur. Quiconque se fait roi s’oppose à l’empereur. » Alors c’est Pilate lui-même qui va le déclarer : « 14 Pilate dit aux Juifs : « Voici votre roi. » 15 Alors ils crièrent : « À mort ! À mort ! Crucifie-le ! » Pilate leur dit : « Vais-je crucifier votre roi ? » » Quelle dérision dans ce dialogue… Jésus pourtant sait qu’il est au cœur de son « heure ». Il est en train de sauver le monde par toutes ces humiliations. Mais malgré eux, même ses ennemis le confessent, Pilate par sa parole, les soldats par l’accoutrement dont ils revêtent le Verbe fait chair. Jésus, portant sa croix sort en direction du Calvaire et y est crucifié. (Notons au passage que Saint Jean ne nous dit rien de ses souffrances ou de la manière dont Jésus réagit.)

Ce roi que nous suivons dans cette journée du vendredi saint est certes défiguré, douloureux, mais il est aimant, débordant de paix et de dignité… royale. Il donne tout comme un roi se sacrifiant pour les siens. Sa royauté est d’ailleurs, du ciel où il règne sur le temps et l’espace et encore bien davantage. Son dépouillement va aller jusqu’au bout : ses vêtements, sa Sainte Tunique et même sa sainte mère qu’il « donne » à son disciple bien-aimé.

Alors que nous allons vénérer dans quelques jours la Sainte Tunique, demandons-nous quel genre de sujets un tel roi veut avoir ? Le disciple doit mettre ses pas dans ceux du Christ. Ne leur a-t-il pas dit après le lavement des pieds (chap 13) : « 14 Si donc moi, le Seigneur et le Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi, vous devez vous laver les pieds les uns aux autres. 15 C’est un exemple que je vous ai donné afin que vous fassiez, vous aussi, comme j’ai fait pour vous. 16 Amen, amen, je vous le dis : un serviteur n’est pas plus grand que son maître, ni un envoyé plus grand que celui qui l’envoie. 17 Sachant cela, heureux êtes-vous, si vous le faites. » ? A la veille de l’ostension, alors que nous allons contempler la tunique de ce roi si humble, de ce Dieu si inattendu, puissions-nous demander la grâce d’être des rois d’humilité pour siéger avec lui, le Roi de Gloire, au jour où règnera sa Miséricorde dans la joie du ciel.

Père Guy-Emmanuel Cariot, recteur

MÉDITATION

Pour méditer cette semaine : Prenons le temps de relire les chapitres 18 et 19 de Saint Jean. Attardons-nous devant un crucifix en silence. Contemplons celui qui nous donne de vénérer sa Tunique Sainte et qui nous invite à le suivre. Devenons les sujets d’un tel roi.

Prière de la semaine : Par ta Sainte Tunique, sauve-moi, Jésus !